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Le Sénat recommande d’accélérer les livraisons de Griffon SAN et Serval SAN pour le Service de santé des armées


Ces derniers temps, plusieurs rapports publiés par le Parlement, le Haut-Comité d’Évaluation de la Condition Militaire [HCECM] et, plus récemment, par la Cour des comptes, ont alerté sur les fragilités du Service de santé des armées [SSA], causées par les réformes qui lui ont été appliquées dans les années 2010.

Réformes qui ont conduit à supprimer des postes au-delà du raisonnable, à mutualiser des moyens [y compris avec le secteur médical civil] ou encore à « différencier » les hôpitaux d’instruction des armées [HIA] restants… Et cela à une période où le SSA a dû faire face à une suractivité, tant sur le territoire national [avec le soutien quotidien aux armées et à la gendarmerie] que sur les théâtres d’opérations extérieurs. Le concept d’innovation frugale [« faire plus avec moins »] promu par certains gourous du « management » a ses limites…

Cela étant, ces rapports ont été pris en compte. Ainsi, la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-25, qui se voulait être de « réparation », a mis un terme aux suppressions de postes tout en stabilisant les crédits du SSA [hors salaires]. Puis celle qui vient d’entrer en vigueur [LPM 2024-30] va encore plus loin en lui donnant les moyens nécessaires pour remonter en puissance, en prévoyant une hausse de ses effectifs [+460] et une augmentation de 50% de son budget de fonctionnement au cours de la période.

Cet effort sera-t-il suffisant? La question peut se poser, selon un nouveau rapport sur le SSA, publié cette fois par le sénateur Dominique de Legge, au nom de la commission des Finances. En effet, le « sous-investissement avéré dans les infrastructures hospitalières a entraîné l’accumulation d’une importante ‘dette grise » » et, dans le même temps, il faudra « (re)constituer des capacités de soutien médical adaptées aux conflits de haute intensité », résume le document.

En effet, les récentes manoeuvres interarmées Orion ont mis en lumière les fragilités du SSA dans un contexte de « haute intensité ». « Alors qu’il faudrait être en mesure de traiter plusieurs centaines de blessés par jour, la chaîne santé déployée dans le cadre de l’exercice était capable d’en traiter 20 », souligne M. de Legge.

Ce point avait d’ailleurs été relevé dans le retour d’expérience [RETEX] de l’exerice Orion. « Pendant la phase 2, nous avons déployé un dispositif de santé d’une capacité d’accueil de douze blessés en urgence absolue par jour », avait rappelé le général Yves Métayer, chef de la division « emploi des forces » à l’État-major des armées [EMA], lors d’une audition parlementaire. Or, avait-il continué, « en haute intensité, il faut s’attendre à des taux de pertes nettement plus élevés ».

Le SSA « s’emploie, et c’est un des enjeux de la LPM, à constituer une chaîne santé et à revoir sa doctrine de soutien, puisqu’en haute intensité, le concept français de médicalisation de l’avant ne sera plus possible », avait-t-il conclu.

Pour préparer le SSA à la haute intensité, la LPM 2024-30 prévoit de le doter des moyens qui lui font actuellement défaut pour faire face à un afflux de blessés et assurer le maintien des forces sur la longue durée. Ainsi, rappelle M. de Legge, il est question de le doter, à « l’horizon 2025, de groupements médico-chirurgicaux [GMC] sous tentes, adaptés à des engagements de 5’000 hommes et des pics de haute intensité ». Et la « reconstitution d’une structure sous tente de 50 à 80 lits permettant de soutenir un engagement de forces de niveau divisionnaire [15’000 hommes] est quant à elle prévue pour 2030 ». Ce qui, estime-t-il, semble « tardif au regard de l’enjeu et du contexte géostratégique ».

Lors de l’examen du rapport en commission, M. de Legge est revenu sur ce point. « Je me demande […] pourquoi il faudra attendre 2030 pour pouvoir disposer d’un hôpital de campagne! Ces délais sont dus tout simplement à des arbitrages réalisés dans le cadre de la loi de programmation militaire qui font que la construction ne pourra pas intervenir avant ! En attendant, il faut continuer de développer en parallèle nos dispositifs d’évacuation médicale », a-t-il dit.

Par ailleurs, le rapport recommande également d’accélérer le renforcement des capacités d’évacuation médicale du SSA, en particulier dans sa composante terrestre, celle-ci étant liée au programme SCORPION de l’armée de Terre.

« Le déploiement des Griffon SAN et Serval SAN, est d’autant plus indispensable qu’elle constitue la modalité préférentielle d’évacuation dans un contexte de haute intensité », fait valoir M. de Legge. Or, celui-ci déplore les livraisons tardives de tels blindés.

Leur « déploiement est tardif par rapport au reste du programme SCORPION. L’évaluation technico-opérationnelle du Griffon SAN n’a été conduite qu’en octobre 2022 et les premiers exemplaires doivent être livrés en 2023, soit quatre ans après la livraison du premier Griffon. Alors que les premiers Serval ont été livrés en mai 2022, le Serval SAN est quant à lui en cours de développement et sa qualification devrait intervenir d’ici à la fin de l’année 2023 », avance le sénateur.

Le décalage du programme SCORPION, acté par la LPM, aura-t-il des conséquences sur les livraisons des Griffon SAN et Serval SAN, alors que la hausse budgétaire la plus importante pour le SSA est prévue pour la dernière annuité de la LPM [+144 millions, ndlr]?

Enfin, le parlementaire a également suggéré de lancer des travaux sur « certains modes d’action innovants ».

« L’un des enjeux identifiés est le développement de la coopération entre les soignants projetés en opérations – qui ne sauraient être spécialistes de l’ensemble des blessures et pathologies auxquelles ils sont confrontés – et les spécialistes en HIA, via la télémédecine », explique en effet M. de Legge, pour qui le « développement d’une capacité d’approvisionnement vers l’avant de produits sanguins par drone doit également être envisagé ».

Photo : Ministère des Armées





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