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L’Italie pourrait manquer son objectif de porter le niveau de ses dépenses militaires à 2% du PIB en 2028


Avec la crise de la zone euro en toile de fond, le ministère italien de la Défense fut soumis à de fortes contraintes budgétaires en 2012, l’objectif du président du Conseil, qui était alors Mario Monti, étant de remettre d’aplomb les finances publiques afin de rassurer les marchés financiers.

Ainsi, selon les données de l’Otan, et alors que les États membres venaient de prendre l’engagement de porter le niveau de leurs budgets militaires respectifs à 2% du PIB, les dépenses militaires transalpines tombèrent à 1,07% du PIB en 2015. Elles amorcèrent une lente remontée par la suite, pour s’établir à environ 30 milliards d’euros [soit 1,51% du PIB] en 2022.

Cependant, la diète budgétaire imposée au début des années 2010 n’a pu que contrarier la modernisation des forces armées italiennes, ce qui fait que, désormais, celles-ci ont besoin de mobiliser davantage de ressources pour financer des programmes capacitaires jugés prioritaires, en particulier en matière d’armement terrestre.

Cela étant, et par rapport aux autres pays membres de l’Otan, les dépenses militaires italiennes sont plus compliquées à évaluer. D’abord, celles-ci comprennent le budget de la Force des carabiniers [c’est à dire de la gendarmerie]. Ensuite, outre le budget « ordinaire » de la Défense, elles sont abondées par un Fonds pour les missions internationales ainsi que par des financements du ministère du Commerce, ce qui, en moyenne, représente 2 à 3 milliards d’euros par an.

Quoi qu’il en soit, en 2023, le budget du ministère italien de la Défense s’élève à 27,748 milliards d’euros [soit +1,8 milliard par rapport à l’exercice précédent]. Et il devrait se maintenir à ce niveau en 2024 et en 2025. Quant aux dépenses militaires totales, elles atteindront les 31,4 milliards d’euros dans les deux ans à venir.

Alors que l’actuel gouvernement italien, emmené par Georgia Meloni, a repris à son compte l’objectif de porter les dépenses militaires à 2% du PIB d’ici à 2028, la trajectoire financière qui vient d’être définie pour les trois prochaines années suggère que ce rendez-vous sera manqué.

En tout cas, c’est ce qu’a dit craindre Guido Crosetto, le ministre italien de la Défense, lors d’une audition parlementaire, le 7 novembre. « Nous sommes en effet loin des 2%, très loin », a-t-il dit. « Cet objectif est impossible pour 2024. Mais si je suis honnête à vous, il le sera aussi pour 2028 », a-t-il ajouté.

« Je suis le plus sincère parmi les ministres de la Défense à dire ‘peut-être que nous ne pourrons pas le faire’, étant donné la situation budgétaire », a insisté M. Crosetto. Pour autant, celui-ci semble déterminé à mener la bataille pour obtenir les crédits nécessaires non seulement à la modernisation des forces armées du pays mais aussi à la compétitivité de la base industrielle et technologique de défense transalpine, laquelle, a-t-il dit, « représente un atout pour le pays dans le contexte géopolitique actuel », via notamment ses programmes de développement technologique.

Ainsi, M. Crosetto a insisté sur le cyber, l’exploration des fonds marins, l’intelligence artificielle, le secteur spatial et… l’aéronautique. D’où l’importance, s’agissant de ce dernier point, de la participation de l’Italie au Global Air Combat Programme [GCAP], aux côtés du Royaume-Uni et du Japon.

« Après l’Eurofighter, nous n’avons plus réalisé d’investissements nous permettant de développer une technologie pertinente », a rappelé M. Crosetto… alors que l’Italie est partie prenante au programme F-35. « Nous avons manqué un saut technologique au cours des 10 à 15 dernières années et le GCAP est ce dont nous avons besoin pour y remédier », a-t-il dit.

Plus généralement, le ministre italien a dit souhaiter un changement de mentalité à l’égard des dépenses militaires, lesquelles ne doivent pas « devenir un sujet de débat politique ». Et d’ajouter : « Nous devons surmonter la controverse idéologique ‘écoeurante’ [« stucchevole »] qui les associe à la seule notion de coûts » alors qu’elles constituent une « valeur stratégique pour le pays, avec un impact également positif sur le développement économique ».

Par ailleurs, et comme l’avaient fait avant lui M. Le Drian en France, M. Crosetto a de nouveau suggéré de sortir les dépenses militaires des règles budgétaires de la zone euro, c’est à dire du « pacte de stabilité et de croissance ».

« Le raisonnement que l’Italie peut faire en Europe est de souligner que l’augmentation des crédits de défense est un objectif d’investissement imposé de l’extérieur et qui ne peut pas entrer en conflit avec les besoins de dépenses d’autres secteurs », a plaidé le ministre italien, qui s’en était déjà pris au pacte de stabilité en juin dernier.

« Si nous ne résolvons pas le cadre actuel d’incohérence entre la responsabilité de renforcer la sécurité et les limites des finances publiques imposées par l’UE, il sera très difficile d’atteindre le seuil minimal de 2 % prévu par l’OTAN dans un délai raisonnable », avait-il fait valoir.

Pour rappel, le pacte de stabilité et de croissance a été suspendu en mars 2020, c’est à dire lors de la crise du covid-19. Mais il doit de nouveau s’appliquer en 2024 à l’issue d’une réforme qui prévoit le maintien de deux de ses dispositions les plus critiquées, à savoir un déficit public inférieur à 3% du PIB et un taux d’endettement ne devant pas excéder 60% du PIB.





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