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Les frais de recherche et de développement pour le futur porte-avions vont-ils être financés par les industriels ?


Le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, perd rarement une occasion de rectifier un article de presse inexact ou un propos, qu’il estime erroné, d’un parlementaire. D’ailleurs, le 12 mars, à l’Assemblée nationale, lors du débat sur le soutien militaire à l’Ukraine, il ne s’est pas privé de le faire avec le député Olivier Marleix, le président du groupe « Les Républicains », quand celui a affirmé que le « mur de la dette » empêchait de passer des commandes auprès des industriels [français] de l’armement.

Cependant, M. Lecornu n’a pas réagi – ou n’a pas souhaité répondre – quand Marine Le Pen, la présidente du groupe « Rassemblement national », a évoqué les difficultés du ministère des Armées à « payer les programmes » de la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30 qui, « à peine votée, apparaît déjà tragiquement sous-financée et menacée de toute part ». Selon elle, le « financement du successeur du Charles de Gaulle ne serait même pas assuré, la DGA [Direction générale de l’armement] demandant aux industriels de le financer en partie ». Et d’ajouter : « Plusieurs commandes – vedettes de protection ou remorqueurs côtiers – peinent à être honorées et risquent même d’être annulées. »

En juin 2023, lors des débats sur le projet de LPM 2024-30, après avoir affirmé que le coût du porte-avions de nouvelle génération [PA NG] avoisinerait les 10 milliards d’euros, le ministre des Armées avait soutenu qu’il fallait « faire la vérité des prix », en pointant les « fausses légendes » et les « rumeurs » au sujet du successeur du « Charles de Gaulle », lequel doit bénéficier d’un financement de 5 milliards d’euros sur les six années à venir.

Cela étant, selon le Canard Enchaîné [édition du 27 mars], les industriels concernés ont confirmé en partie les propos de Mme Le Pen. « Tout l’enjeu pour les autorités est de convaincre TechnicAtome […] ainsi que Naval Group […] de prendre à leur charge, via un emprunt ou sur leurs fonds propres, une part des frais de recherche et de développement à engager pour le porte-avions de nouvelle génération », écrit-il. « L’effort demandé à ces deux entreprises [largement contrôlée par l’État lui-même], représente, au bas mot, ‘plusieurs centaines de millions d’euros’, selon un bon connaisseur du dossier », poursuit-il.

Au passage, Les Chantiers de l’Atlantique sont également impliqués dans la construction de ce futur porte-avions, via la co-entreprise « MO Porte-Avions », créée avec Naval Group.

Pour l’hebdomadaire, la nécessité de financer de nouvelles priorités, comme les commandes supplémentaires de munitions, expliquerait les « interrogations sur certains financements à court terme » du PA NG. D’autant plus que, le 13 mars, devant les sénateurs, M. Lecornu a déclaré qu’il « faudra se poser la question, dans les mois à venir, de l’accélération des commandes et de la militarisation de l’espace », en évoquant la « revoyure » prévue par le LPM 2024-30… en 2027.

Pour autant, cette demande de financement adressée aux industriels impliqués dans le programme PA NG n’est pas nouvelle, puisqu’elle avait été révélée par La Tribune, en avril 2023. « Les industriels […] vont autofinancer 1 milliard d’euros pour lancer la construction du PA NG dès l’horizon fin 2025 / début 2026 », via une « avance de trésorerie » qui ne devait alors pas concerner TechnicAtome, avait avancé ce média.

« Il ne manque aucun milliard : nous avons juste décidé de les étaler différemment dans la programmation comme l’aurait sûrement demandé n’importe quel client à l’export », avait alors justifié le ministère des Armées, pour qui « cette mise en tension » allait aussi « permettre de mieux rationaliser les coûts terminaux » de ce programme étant donné que le « modèle de financement ne présentait jusqu’à présent aucun risque pour les entreprises. »

Reste à voir si Naval Group sera en mesure de fournir l’effort qui lui est demandé. Selon son rapport financier pour l’exercice 2023, l’industriel dispose de 1,37 milliard d’euros de trésorerie [1,62 milliard en 2022, ndlr] et dépense environ 100 millions d’euros par an [en moyenne] en frais de recherche et de développement.





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