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Léon Gloden dans le viseur du parquet


La procureure générale d’État, Martine Solovieff, a adressé un courrier au vitriol au ministre des Affaires intérieures qui l’interprète comme un appel à l’aide du parquet. Les députés s’interrogent.

Tout dans le courrier que la procureure générale d’État, Martine Solovieff, a adressé au ministre des Affaires intérieures, Léon Gloden, transpire la critique à l’encontre du dispositif mis en place pour mener des actions policières dans la capitale afin de lutter contre la mendicité. Il a beau être la cible de nombreux observateurs qui désapprouvent cette dérive sécuritaire, Léon Gloden reste droit dans ses bottes.

Ce n’est donc pas un courrier de Martine Solovieff réclamant le retour des effectifs de police judiciaire (PJ) dans leurs services respectifs qui va le déstabiliser. «Ce courrier est un appel à l’aide de la procureure, comme je l’ai déjà dit», déclare le ministre et d’ajouter qu’il ne se sent pas du tout «désavoué», comme le suggère le député déi Lénk David Wagner.

Hier, lors de la séance des questions au gouvernement, ce dernier a pu interroger le ministre qui ne lui a rien appris de plus, sinon que 55 personnels supplémentaires allaient être recrutés dans les différents services de la PJ.

Néanmoins, le ministre s’est montré moins virulent qu’à l’antenne de RTL Radio la veille, où il accusait l’ancien gouvernement, et en particulier les écolos et les socialistes, d’être responsable de toute cette situation. Le manque d’effectif ainsi que la criminalité à la gare seraient sa faute. La ligne de défense du ministre se résume à cela et le député socialiste Dan Biancalana réclame des explications, lui aussi.

La lettre de Martine Solovieff met le doigt là où ça fait mal. Toutes les sections spécialisées de la PJ sont appelées à participer aux «rondes pour traquer les infractions au règlement de police de la Ville de Luxembourg et plus particulièrement la mendicité organisée ou en bande ainsi que toutes les autres formes de mendicité», écrit-elle.

Pour quel résultat ? Deux procès-verbaux sont arrivés au parquet de Luxembourg dont une autodénonciation. «Impressionnant», commente la procureure.

Martine Solovieff explique clairement au ministre Gloden que les autorités judiciaires sont privées des enquêteurs spécialisés qui exécutent leurs missions sous leurs ordres. Or, le plan d’action policier mis en place s’inscrit dans le cadre de la police judiciaire qui ne peut être exercée que sous la direction du procureur d’État.

Martine Solovieff en profite pour rappeler à Léon Gloden qu’il était lui-même rapporteur du chapitre relatif à la justice de la nouvelle Constitution consacrant le pouvoir judiciaire comme «troisième pouvoir de notre État de droit garantissant le principe de la séparation des pouvoirs», insiste-t-elle.

«La séparation des pouvoirs est respectée et se porte bien», répond Léon Gloden, refusant d’en dire davantage à David Wagner qui s’attendait à mieux comme prise de position par rapport à un courrier aussi assassin.

Le GAFI sera ravi

Ce n’est pas la première fois que Martine Solovieff s’oppose à Léon Gloden depuis qu’il a validé le règlement antimendicité tant décrié. À commencer par le parquet lui-même qui n’a pas envie d’être encombré par ce genre d’affaires alors que la réserve en dossiers en attente d’être traités par les enquêteurs de la PJ est «impressionnante», insiste la procureure. Quelque 1 300 dossiers sont dans la pile et ce n’est pas le moment de retirer des effectifs pour des bagatelles.

Le dispositif a beau viser également la prostitution, l’immigration illégale et le trafic de stupéfiants, selon les propos répétés du ministre, il ne convient pas au parquet qui demande à ce qu’il soit revu, et surtout, qui réclame le retour des enquêteurs spécialisés au bercail. Parmi eux figuraient également des effectifs de la cellule économique et financière et antiblanchiment, ce que semblait ignorer le ministre qui les a déchargés des rondes dans la capitale.

Cela étant dit, ce geste généreux ne suffira pas à apaiser l’indignation du parquet, qui n’a pas été consulté ni averti de la mise en place du dispositif, sinon par voie de presse. La procureure n’est guère amusée et ne semble pas plaisanter quand elle rappelle au ministre que la procédure de suivi de la visite du Groupe d’action financière (GAFI) est prévue pour 2026 et qu’il faudra bien mentionner à ce moment-là que le Luxembourg a mis la priorité sur la lutte contre la mendicité dans la capitale.



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