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Selon son commandant, la Marine royale canadienne se trouve dans un « état critique »


Bordé par trois océans [Arctique, Atlantique et Pacifique], le Canada n’est pas à l’abri de « frictions » avec la Russie [voire, dans une moindre mesure, avec la Chine], en particulier dans la région du Grand Nord, où Moscou a des prétentions territoriales en se basant sur les dorsales Lomonossov et Mendeleïev, considérées comme étant des extensions de son plateau continental. Pour autant, et alors que la situation mondiale continue de se dégrader, Ottawa ne semble pas avoir pris la pleine mesure de ces défis sécuritaires et tiré les leçons de l’histoire.

Ainsi, lors de la Seconde Guerre Mondiale, le Canada fut non seulement visé par les U-Boot allemands, comme lors de la « bataille du Saint-Laurent », entre 1942 et 1944, mais aussi par les sous-marins japonais, l’un d’entre eux ayant attaqué l’île de Vancouver, laquelle abritait une importante station de radiogoniométrie dans le Pacifique Nord. Durant la Guerre Froide, l’Arctique suscita l’intérêt de l’Union soviétique, au point que cette région connut la plus forte concentration de sous-marins nucléaires…

Quoi qu’il en soit, en raison de polémiques « politiciennes », comme au sujet de l’achat de chasseurs-bombardiers américains F-35A, de décisions discutables et d’un sous-investissement chronique depuis la fin de la Guerre Froide, les forces armées canadiennes sont actuellement « à l’os ».

C’est particulièrement le cas de la Marine royale canadienne [MRC], au point que son commandant, le vice-amiral Angus Topshee, a diffusé une vidéo sur les réseaux sociaux pour alerter sur « l’état critique » dans lequel elle se trouve. Une telle démarche est inédite…

L’une des raisons de cette situation est budgétaire, les dépenses miliaires canadiennes, rapportées au PIB, étant les plus faibles au sein de l’Otan. Et cela ne va pas s’arranger, après la décision du gouvernement emmené par Justin Trudeau de les réduire d’un milliard de dollars canadiens [700 millions d’euros] lors du prochain exercice fiscal.

« La MRC est actuellement confrontée à des défis très sérieux, ce qui pourrait signifier que nous ne parviendrons pas à respecter nos engagements en matière de posture de force et de préparation en 2024 et au-delà », a ainsi prévenu le vice-amiral Topshee.

La première lacune porte sur les effectifs de la Marine royale canadienne, certaines spécialités affichant un déficit en personnels de 20%, si ce n’est davantage. Pour son commandant, la faute en incombe au service de recrutement des forces armées canadiennes, lequel n’a pas réussi à tenir ses objectifs depuis dix ans.

Et cela n’est pas sans conséquence : actuellement, la MRC ne peut armer qu’un seul de ses quatre patrouilleurs arctiques et extracôtiers de la classe Harry DeWolfe. En outre, a expliqué le vice-amiral Topshee, une « pénurie de techniciens qualifiés limite notre capacité à entretenir et à exploiter nos navires, ce qui nous amène à donner la priorité aux frégates de la classe Halifax au détriment des navires de défense côtière de la classe Klingston ».

Un autre souci est le retard pris pour le remplacement des douze frégates de la classe Halifax… Retard qui va obliger la MRC à faire des efforts significatifs pour les maintenir en service jusqu’en 2040 alors que leur durée de vie opérationnelle, commencée dans les années 1990, avait été fixée à trente ans.

Pour rappel, il est prévu de remplacer ces navires par quinze frégates de Type 26 de conception britannique. En 2021, il fut avancé que le coût du programme était passé de 26 à 77,3 milliards de dollars canadiens… et que la première unité ne serait pas livrée avant 2031.

« C’est un défi considérable… J’aurais aimé qu’il n’en soit pas ainsi, mais je crains qu’il n’y ait tout simplement pas d’autre choix », a regretté le vice-amiral Topshee dans sa vidéo. Mais cela aura aussi des conséquences au niveau opérationnel.

« Actuellement, la MRC n’a pas la capacité de détecter les incursions dans ses eaux territoriales des nouvelles flottes sous-marines russe et américaine. Même s’ils ont été modernisés, les sous-marins conventionnels de classe Victoria et les frégates de classe Halifax ne disposent pas de coque renforcée leur permettant de patrouiller dans l’extrême nord arctique », a en effet souligné le Centre d’études stratégiques de la Marine [CESM], dans un note publiée en 2018.

Justement, les quatre sous-marins de la MRC défraient la chronique depuis leur achat auprès du Royaume-Uni, à la fin des années 1990 pour 750 millions de dollars canadiens. Et cela en raison de leur taux de disponibilité, proche du zéro, malgré des efforts financiers significatifs pour les maintenir en condition opérationnelle.

Aussi, la MRC voudrait obtenir douze nouveaux sous-marins… Mais elle devra surtout s’armer de patience, le vice-amiral Topshee ayant en effet précisé que le « projet de sous-marin de patrouille canadien » pourrait se concrétiser « au milieu des années 2030 ».





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