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SCA : Selon la Cour des comptes, l’interarmisation du soutien pourrait être remise en question


En 2008, conformément aux orientations de la Révision générale des politiques publiques [RGPP], il fut décidé de fusionner les commissariats d’armée au sein d’un Service du commissariat des armées [SCA] et de pousser la logique d’interarmisation avec la création de « bases de défense », l’objectif étant de mutaliser le soutien des unités situées à l’intérieur d’un périmètre donné [1h à 1h30 de route] en concentrant sur une même emprise les services de gestion, d’administration, d’habillement, etc. Et cela, quitte à battre en brèche le principe « un chef, une mission, des moyens ».

Menée avec l’idée de faire des économies, cette réforme, qui plus est accompagnée par de nombreuses réductions de postes dans les fonctions dédiés au soutien, ne contenta personne… À commencer par les « soutenants », soumis à une pression d’autant plus forte que le logiciel de paiement des soldes Louvois faisaient des siennes.

Quoi qu’il en soit, en 2014, le Haut Comité d’Évalualtion de la Condition Militaire [HCECM] mit les pieds dans le plans lors de la publication de son rapport thématique en relayant l’insatisfaction des militaires, ceux-ci ayant dénoncé la « déshumanisation » et le « flou » qui caractérisaient alors les relations entre les soutenus et les soutenants.

« Dans les formations embasées, les militaires constatent au quotidien que l’encadrement n’a plus les moyens d’agir sur le soutien » et « les chefs militaires ont de moins en moins la capacité à régler les problèmes rencontrés, ce qui se traduit par un affaiblissement à cet égard de la fonction de commandement », avait par ailleurs constaté le HCECM.

La remontée en puissance des armées, amorcées en 2015, n’arrangera pas la situation, les moyens du SCA étant toujours contraints. Cependant, à la faveur de la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-25, une nouvelle réforme [SCA 22] fut lancée, avec la création de 206 espace ATLAS [un guichet pour faciliter les démarches administratives des militaires, ndlr] pour améliorer la proximité entre les soutenus et les soutenants, la rationalisation – a minima – des groupements de soutien des bases de défense [GSBdD] et la réforme de la fonction habillement.

Pour autant, cet effort en matière de proximité n’est pas encore suffisants… étant donné que, selon la Cour des comptes, le « sentiment d’un modèle encore trop rigide » demeure…

« Ce modèle ayant été conçu selon une logique matricielle, donc en rupture avec le fonctionnement pyramidal du ministère des Armées, sa complexité intrinsèque demeure, à bien des égards, problématique pour le niveau local. Pour être l’échelon de synthèse de la mise en œuvre de l’ensemble des soutiens, la plupart des GSBdD cristallisent de ce fait la majorité des tensions ressenties par les soutenus », détaille la Cour des comptes, dans un rapport publié ce 20 novembre.

Et d’ajouter : « En dépit d’importants efforts de coordination visant à donner davantage de transversalité au modèle et malgré le très fort investissement des personnels au niveau local, la logique de filières centrées sur le pilotage d’un domaine dont elles ont la charge, avec les processus associés, enferme les acteurs locaux dans un cadre jugé trop rigide. Le sentiment de lourdeur est en outre renforcé par un suivi chronophage de l’activité, qui détourne trop souvent les soutenants locaux de leur cœur de métier. »

Cependant, et alors qu’il devra adapter ses capacités opérationnelles à la « haute intensité » via le plan « SCA Ambition 2030 », le SCA a su répondre présent aux récentes crises [Louvois, Covid] tout en étant au rendez-vous des opérations extérieures.

Aussi, estime la Cour des comptes, « en dépit de tensions locales liées à l’insuffisance de ressources sur certaines fonctions [restauration, habillement, transports] et à la complexité de processus qui gagneraient à être simplifiés par la redéfinition de marges de manœuvre locales, l’architecture générale du SCA doit désormais être stabilisée ».

Toutefois, et comme l’a suggéré le président Macron lors de son discours du 13 juillet dernier à l’Hôtel de Brienne, le modèle d’organisation et de fonctionnement du ministère des Armées pourrait être revu afin de « redonner les leviers d’action à ceux qui portent les missions en opérations comme au coeur des territoire ». Des propos qui font écho au dernier rapport thématique du HCECM. « Les officiers en situation de commandement ont perdu des leviers d’action. Ils ne peuvent plus régler efficacement et surtout rapidement les problèmes du quotidien. Leur autorité en est directement affectée », a-t-il en effet souligné.

En clair, il s’agirait de « développer la subsidiarité au quotidien », pour reprendre la formule figurant dans le dernier plan de transformation de l’armée de Terre, lequel vise à donner plus de d’autonomie aux brigades. « Certains freins [à cette autonomie]relèvent de l’organisation interarmées : il nous incombe de les identifier, d’en limiter les effets et de formuler des propositions pour les lever à moyen terme », explique ce document.

Or, selon la Cour des comptes, des « réflexions sur l’organisation territoriale et fonctionnelle des soutiens sont actuellement menées par les armées, dont notamment la révision de la carte des bases de défense et l’articulation des processus relatifs à la gestion de la solde ». Et, à ce propos, poursuit-elle, les armées, et plus particulièrement l’armée de Terre, ont récemment demandé à « réinternaliser certaines fonctions », ce qui pourrait aboutnir « à remettre en cause le modèle du SCA qui repose, depuis 2010, sur l’interarmisation du soutien ».

A priori, la Cour des comptes est réservée face à une nouvelle réforme du soutien. « Outre qu’elles doivent être interrogées à l’aune de la réduction des effectifs du soutien subie depuis plusieurs années, les évolutions qui pourraient être envisagées ne sauraient être mises en œuvre en l’absence d’une stratégie globale et d’une évaluation sérieuse des gains qu’elles permettent d’escompter au regard des risques qui pourraient en résulter s’agissant du fonctionnement du SCA et de l’accomplissement de ses missions », a-t-elle en effet estimé.

Par ailleurs, le rapport note que que la « difficulté à recruter et à fidéliser ses personnels affecte fortement » la capacité de l’armée de Terre à « honorer les postes du SCA ». Résultat : « Comme cela se passe également dans les régiments, certains emplois doivent être pourvus par des militaires de grade inférieur à celui que justifie le poste, notamment au niveau des sous-officiers. Cette situation peut entraîner des difficultés en termes de management comme, à titre d’exemple, au CIMOb [Centre interarmées du soutien à la mobilité] où de jeunes sous-officiers sans expérience doivent encadrer des équipes composées d’une dizaine d’agents civils ».

Photo : Service du Commissariat des Armées





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