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En matière de dépenses militaires, l’Ukraine a presque fait jeu égal avec la Russie en 2023


L’an passé, l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm [SIPRI] avait expliqué que les dépenses militaires mondiales venaient de connaître leur plus forte progression depuis au moins trente ans [+ 3,7 % en termes réels], pour s’établir à 2240 milliards de dollars en 2022 [soit 2,2 % du PIB mondial]. Évidemment, la guerre en Ukraine n’était pas étrangère à cette évolution, tout comme les tensions observées dans l’Indo-Pacifique. Mais on n’avait encore rien vu…

En effet, dans la dernière étude qu’il vient de publier, le SIPRI a déterminé que les dépenses militaires mondiales ont atteint le niveau record de 2443 milliards de dollars en 2023, après avoir connu une hausse significative de 6,8 % en termes réels par rapport à l’année précédente. Cette fois, toutes les zones géographiques sont concernées, avec des augmentations « particulièrement importantes » en Europe, en Asie, en Océanie et au Moyen-Orient », souligne l’institut suédois.

« L’augmentation sans précédent des dépenses militaires est une réponse directe à la détérioration de la paix et de la sécurité internationales », a commenté le Dr Nan Tian, chercheur principal au programme dépenses militaires et production d’armement du SIPRI. Il avait dit exactement la même chose dans l’édition 2022 de cette étude… « Les États donnent la priorité à la force militaire, ce qui risque d’alimenter la spirale ‘action-réaction’ dans un contexte géopolitique et sécuritaire de plus en plus instable », a-t-il ajouté.

Cette neuvième hausse consécutive des dépenses militaires depuis l’annexion de la Crimée est en grande partie due à la guerre en Ukraine ainsi qu’à la défiance entre les pays membres de l’Otan et la Russie.

Ainsi, avec un montant de 109 milliards de dollars, le budget militaire russe a augmenté de 24 % en 2023 [et 57 % depuis 2014]. Il représente 16 % des dépenses gouvernementales et 5,9 % du PIB. C’est ce qui a permis au Kremlin de passer à une « économie de guerre » et, partant, de reconstituer ses forces plus rapidement que ne l’avaient prévu les services de renseignement occidentaux.

Sur ce point, le Commandant suprême des forces alliées en Europe [SACEUR], le général américain Christopher Cavoli, a récemment souligné que le budget militaire russe allait dépasser les dépenses sociales pour la première fois depuis la fin de la Guerre Froide. Et d’ajouter que les perspectives de croissance de l’économie russes sont solides, avec une hausse attendue du PIB de 2,6 % en 2024, selon les projections du Fonds monétaire international.

Quant à l’Ukraine, ses dépenses militaires ont augmenté de 51 % en 2023, pour s’élever à 64,8 milliards de dollars, ce qui représente 58 % de budget général et 37 % de son PIB. Toutefois, a relevé le SIPRI, l’aide militaire reçue par Kiev a presque rééquilibré les deux plateaux de la balance.

« L’Ukraine a également reçu au moins 35 milliards de dollars d’aide militaire au cours de l’année, dont 25,4 milliards de dollars des États-Unis. Ensemble, cette aide et les dépenses militaires de l’Ukraine équivalent à environ 91 % des dépenses militaires russes », a calculé l’institut. Cependant, cette quasi-parité budgétaire n’empêche pas que le rapport des forces reste favorable à la Russie, du moins sur le plan quantitatif.

Quant à l’Otan, certains de ses membres ont fait le nécessaire pour porter leurs budgets militaires à au moins 2 % du PIB, conformément aux engagements pris lors du sommet de Newport, organisé en 2014. Cet effet s’est accentué depuis le début de la guerre en Ukraine.

Ainsi, en 2023, l’effort de défense des Alliés a atteint le total de 1341 milliards de dollars, soit 55 % des dépenses militaires mondiales. Ce chiffre devrait encore augmenter cette année, étant donné que l’Otan compte désormais la Finlande et la Suède parmi ses membres.

Porté à 916 milliards de dollars en 2023 [+ 2,3 %], le budget militaire des États-Unis a représenté 68 % des dépenses totales de l’Otan. Quant aux membres européens de l’Alliance, « leur part combinée dans le total » de ces dépenses « est de 28 % ». Soit le chiffre le plus élevé depuis dix ans. « Les 4 % restants proviennent du Canada et de la Turquie », a précisé le SIPRI.

À noter que la Pologne se distingue des autres membres européens de l’Otan, son budget militaire – 31,6 milliards – ayant progressé de 75 % d’une année sur l’autre, ce qui est « de loin la plus forte augmentation annuelle » de tous les pays du Vieux Continent.

« Pour les États européens de l’Otan, ces deux dernières années de guerre en Ukraine ont fondamentalement modifié leurs perspectives en matière de sécurité. Cette nouvelle perception de la menace se traduit par le fait qu’une part croissante du PIB est consacrée aux dépenses militaires, la règle des 2 % de l’Otan étant de plus en plus considérée comme une référence plutôt que comme un objectif à atteindre », a expliqué Lorenzo Scarazzato, chercheur au programme dépenses militaires et production d’armement du SIPRI.

À noter toutefois que seulement 11 membres de l’Otan ont atteint, voire dépassé, le seuil des 2 % du PIB. Mais plus important encore est sans doute la part des dépenses militaires dédiée aux investissements, laquelle a été fixée à 20 %. Sur ce plan, ils sont 28 à avoir atteint cet objectif [contre seulement 7 dix ans plus tôt].

Cela étant, le budget du Pentagone ne concerne pas la seule Otan, les États-Unis ayant fait de l’Indo-Pacifique une de leurs priorités. Dans cette région, la Chine, dotée du second budget militaire au niveau mondial, a alloué environ 296 milliards de dollars à ses forces armées.

Cependant, les chiffres avancées par le SIPRI sont différents de ceux livrés par Pékin, sachant que, en 2023, le montant des dépenses militaires chinoises devait s’établir officiellement à 225 milliards de dollars. Comment expliquer ce delta de 71 milliards ?

Quoi qu’il en soit, pour le SIPRI, « les dépenses de la Chine représentent la moitié du total des dépenses militaires de la région Asie et Océanie ». Et elles justifient l’effort de défense des pays de l’Indo-Pacifique qui s’estiment menacés par les visées chinoises.

Ainsi, le Japon a augmenté le budget de ses forces d’autodéfense de 11 % en 2023, celui-ci ayant dépassé les 50 milliards de dollars. Même chose pour Taïwan, qui a porté ses dépenses militaires à 16,6 milliards de dollars [+ 11 %]. L’Inde n’est pas en reste, avec une hausse de 4,2 % de son budget militaire, celui-ci approchant désormais les 84 milliards de dollars.

Enfin, les tensions au Moyen-Orient ont incité la plupart des pays de la région à renforcer leurs capacités de défense. Ce qui s’est traduit par une hausse globale de leurs budgets militaires de 9 %. « Il s’agit de la plus forte augmentation annuelle jamais enregistrée dans la région au cours des dix dernières années », a noté le SIPRI.

L’Arabie saoudite occupe la première marche du « podium régional », avec un budget militaire 27,7 milliards de dollars [+ 24 %], Israël arrivant en seconde position. Quant à l’Iran, il reste le « 4e plus grand dépensier militaire au Moyen-Orient », avec 10,3 milliards de dollars. Plus du tiers de ce montant [37 %] est « absorbé » par le Corps des gardiens de la révolution.





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