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un effet visible du changement climatique


Depuis un mois, l’on assiste à des vagues de retours précoces des grues cendrées, en province de Luxembourg. Un phénomène à surveiller.

Elles sont majestueuses et font littéralement tourner les têtes vers le ciel chaque année. Les grues cendrées, ces splendides oiseaux aux ailes de deux mètres d’envergure, passent au-dessus de la province de Luxembourg lors de leur migration, fin octobre et fin février.

On observe pourtant des vagues de retour depuis début janvier, soit presque deux mois plus tôt pour ces oiseaux dont le retour est normalement annonciateur de celui du printemps. «Rien que le 9 février, 1 074 individus ont été répertoriés», explique Alain Paquet, ornithologue ayant travaillé au département d’études de Natagora durant des années. «Et ce n’est pas le premier pic, deux autres avaient déjà été enregistrés autour du 9 et du 30 janvier.»

Un phénomène qui tend à s’accentuer avec les années. Inquiétant? «C’est un phénomène dû au réchauffement climatique. Les températures hivernales sont plus douces, elles vont donc moins loin et rentrent plus vite. Ce n’est pas encore un problème, car l’espèce est extrêmement résiliente et s’adapte très bien.»

Mais pourquoi le passage des grues est un tel évènement par ici? Appelé «le grand déferlement», ce phénomène fascinant s’observe deux fois par an et est le rendez-vous de nombreux spécialistes et amoureux de la nature. Les grues cendrées, qui passent l’été en Scandinavie, traversent l’Europe pour aller en Afrique du Nord et en Espagne passer l’hiver. «On observe cependant qu’elles ne vont plus aussi loin qu’avant à cause de la hausse des températures; certaines hivernent en France ou en Allemagne», constate Alain Paquet.

À la fin de l’hiver, elles font le chemin inverse. C’est celui que l’on observe actuellement. «Le gros de la migration se verra fin février, mais on observe que leur retour s’étale sur davantage de semaines qu’auparavant. Le problème avec ces retours précoces, c’est qu’en cas de chute des températures et de gros coup de gel, les oiseaux peuvent se retrouver piégés en chemin.»

Un ciel d’accueil

Mais si ce retour s’étale, le grand déferlement ne va-t-il pas se transformer avec les années en une multitude de petits déferlements? «C’est une possibilité, mais nous n’avons pas encore de vue claire sur les potentielles problématiques que cela pourrait engendrer ou non.» La nature ayant déjà prouvé maintes fois ses capacités de résilience, on peut espérer que tout se passe bien.

Si certaines grues reviennent plus tôt, c’est aussi à cause de la course au territoire une fois rentrée dans leur villégiature estivale. «Les adultes essayent de rentrer au plus vite pour réserver leur étang, car chaque famille a le sien et les meilleures places sont vite prises.» D’autant plus qu’avant d’arriver en Scandinavie et de choisir le plus bel étang du coin, elles doivent d’abord s’arrêter en mer Baltique pour que les célibataires puissent trouver l’amour. C’est seulement quand les couples sont formés qu’ils feront ensemble les 1 000 kilomètres restant jusqu’à la maison et se reproduiront.

Mais d’abord, place au spectacle dans le ciel de la province de Luxembourg, dont l’est a la chance de faire partie de leur trajectoire. En vol, le chant de la grue cendrée, un «grou» tonitruant, peut s’entendre à 4 kilomètres à la ronde. Une véritable symphonie qui retentit toutes les 10-15 secondes et accompagne le vol majestueux de leurs processions en V ou en Y. Se déplaçant avec les ascendances thermiques, elles évitent le vol battu et planent à une altitude de 200 à 1 500 mètres, à une vitesse pouvant atteindre 90 km/h. «La grande route migratoire de l’ouest occidental, qui est l’un des principaux axes de migration, passe par l’est de la Belgique, d’Arlon à Bouillon jusqu’aux Fagnes. On peut même observer jusqu’à 200 000 grues sur une journée les jours clefs, notamment lors de leur halte lac du Der, dans le nord-ouest de la France. C’est fascinant», souligne l’ornithologue.

Car si on peut les observer dans le ciel, les grues cendrées s’arrêtent rarement en Belgique. «Elles font des haltes tous les 200 à 300 kilomètres, et survolent donc généralement la Belgique d’une traite», conclut Alain Paquet.



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