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Sophie Schram se présente face aux juges pour donner sa version des faits


On ne l’attendait pas et pourtant, celle qui a fait sortir Enrico Lunghi de ses gonds a fait une apparition surprise hier. Comme ses trois coprévenus, elle n’aurait pas cherché à lui nuire.

«Sophie Schram est là!» À la surprise générale, celle par qui toute l’affaire Lunghi a commencé est apparue dans la salle d’audience en ce dernier jour de procès et a tenu à donner sa version des faits. La veille, le procureur avait requis sa condamnation à une amende pour calomnies et injures sur la personne d’Enrico Lunghi. La jeune femme, jusqu’à présent absente du procès pour des raisons personnelles, a relaté l’incident et assuré qu’«Enrico Lunghi m’a blessée physiquement et psychiquement». Son bandage ne faisait pas partie d’une mise en scène pour nuire à l’ancien directeur du musée d’Art moderne de Luxembourg (Mudam).

«Tout RTL avait les images de l’agression dans son ordinateur. Tout le monde m’en a parlé», affirme l’ancienne journaliste de RTL, à qui il est reproché de n’avoir fait état de sa blessure que plusieurs jours après les faits. «Une partie de vos collègues de l’époque, dont le caméraman présent avec vous lors du reportage, ont été interrogés par la police et il n’en ressort pas que vous vous soyez plainte de douleurs», lui rétorque le président de la 7e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg.

Ce bandage a changé la donne et l’appréciation de l’altercation. Le premier reportage ayant été refusé par Steve Schmit, il est décidé d’en préparer un deuxième relatant les faits qui ne serait diffusé qu’en cas de dépôt de plainte de Sophie Schram.

«Pourquoi avoir arrêté vos démarches juridiques ?»

Le 3 octobre 2016, le reportage monté par Marc Thoma est finalement diffusé sans qu’aucune plainte n’ait été déposée. Sept ans plus tard, on ne sait toujours pas qui a donné son accord pour sa diffusion. Le juge cherche à comprendre : «Si Enrico Lunghi a été aussi terrible que vous le dites, pourquoi avoir arrêté vos démarches juridiques ?» «Parce qu’il m’avait fait une lettre d’excuses et s’était excusé dans une interview télévisée», répond la jeune femme. «À moins que des gens aient fait pression sur vous, vous auriez pu devenir une égérie de la pression sur les journalistes», lance, un brin narquois, le juge qui a été le sel de ce procès.

La jeune femme de 41 ans venait de se dire victime d’une «Caroline Mart qui avait intérêt à défendre Lunghi» et «avait la rédaction à sa botte», ainsi que certains membres de l’Autorité luxembourgeoise indépendante de l’audiovisuel (ALIA), dont certains étaient aussi des amis d’Enrico Lunghi. Alain Berwick, ancien CEO de RTL, s’est engouffré dans la brèche pour avancer à nouveau qu’«une certaine énergie a été déployée pour qu’on trouve le moins possible» d’éléments sur l’agression.

«Mis devant le fait accompli»

Omerta, théorie du complot, mise en scène de blessure, reportage orchestré pour nuire à Enrico Lunghi, règlements de comptes entre amis, le procès devient surréaliste. «La justice n’en sortira pas grandie», note Me André Lutgen, l’avocat d’Alain Berwick. «On jette les heures de temps judiciaire à la pelle par la fenêtre pour une affaire qui va faire « pschitt! » à l’arrivée.» Alain Berwick, comme les autres intervenants de RTL, doit être acquitté. «Aucun d’entre eux n’a de raison d’avoir voulu nuire à Enrico Lunghi au-delà de ce qu’il s’était déjà infligé lui-même.»

Marc Thoma n’a quant à lui fait que «retranscrire un fait brut» pour «informer le public», défend Me Baulisch qui rejette les accusations de manipulation des images et du son. Steve Schmit «n’a rien non plus à se reprocher», selon son avocat Thierry Reisch. «S’il était responsable de la diffusion du reportage le 3 octobre, il aurait dû savoir qu’une plainte avait été déposée et il aurait dû pouvoir décider de manière autonome du contenu du reportage et de sa date de diffusion.» Or le prévenu, dont le parquet a requis l’acquittement, dit avoir «été mis devant le fait accompli». «Il a été complètement mis à l’écart du processus de décision.» Bien qu’il prétende le contraire, la décision de diffuser le fameux reportage ne pourrait qu’avoir été prise par Alain Berwick, qui s’en défend. Son avocat précise qu’il «avait autre chose à faire, comme un groupe à diriger».

Le fait est qu’un reportage «à charge contre Enrico Lunghi» – dont «le montage a été manipulé» et jugé «ne pas correspondre aux pratiques déontologiques» par le Conseil de presse et l’Autorité luxembourgeoise indépendante de l’audiovisuel, qui dénonce «une manipulation de l’image et du son pour créer une réalité inexistante» – a été diffusé. Il a entraîné une enquête disciplinaire à l’encontre de l’ancien directeur du Mudam et un audit interne à RTL. L’émission Den Nol op de Kapp a été arrêtée, Alain Berwick a pris une retraite anticipée, Alain Rousseau a quitté la rédaction et Enrico Lunghi, le Mudam.

Le prononcé est fixé au 12 décembre.



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Sophie Schram se présente face aux juges pour donner sa version des faits


On ne l’attendait pas et pourtant, celle qui a fait sortir Enrico Lunghi de ses gonds a fait une apparition surprise hier. Comme ses trois coprévenus, elle n’aurait pas cherché à lui nuire.

«Sophie Schram est là!» À la surprise générale, celle par qui toute l’affaire Lunghi a commencé est apparue dans la salle d’audience en ce dernier jour de procès et a tenu à donner sa version des faits. La veille, le procureur avait requis sa condamnation à une amende pour calomnies et injures sur la personne d’Enrico Lunghi. La jeune femme, jusqu’à présent absente du procès pour des raisons personnelles, a relaté l’incident et assuré qu’«Enrico Lunghi m’a blessée physiquement et psychiquement». Son bandage ne faisait pas partie d’une mise en scène pour nuire à l’ancien directeur du musée d’Art moderne de Luxembourg (Mudam).

«Tout RTL avait les images de l’agression dans son ordinateur. Tout le monde m’en a parlé», affirme l’ancienne journaliste de RTL, à qui il est reproché de n’avoir fait état de sa blessure que plusieurs jours après les faits. «Une partie de vos collègues de l’époque, dont le caméraman présent avec vous lors du reportage, ont été interrogés par la police et il n’en ressort pas que vous vous soyez plainte de douleurs», lui rétorque le président de la 7e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg.

Ce bandage a changé la donne et l’appréciation de l’altercation. Le premier reportage ayant été refusé par Steve Schmit, il est décidé d’en préparer un deuxième relatant les faits qui ne serait diffusé qu’en cas de dépôt de plainte de Sophie Schram.

«Pourquoi avoir arrêté vos démarches juridiques ?»

Le 3 octobre 2016, le reportage monté par Marc Thoma est finalement diffusé sans qu’aucune plainte n’ait été déposée. Sept ans plus tard, on ne sait toujours pas qui a donné son accord pour sa diffusion. Le juge cherche à comprendre : «Si Enrico Lunghi a été aussi terrible que vous le dites, pourquoi avoir arrêté vos démarches juridiques ?» «Parce qu’il m’avait fait une lettre d’excuses et s’était excusé dans une interview télévisée», répond la jeune femme. «À moins que des gens aient fait pression sur vous, vous auriez pu devenir une égérie de la pression sur les journalistes», lance, un brin narquois, le juge qui a été le sel de ce procès.

La jeune femme de 41 ans venait de se dire victime d’une «Caroline Mart qui avait intérêt à défendre Lunghi» et «avait la rédaction à sa botte», ainsi que certains membres de l’Autorité luxembourgeoise indépendante de l’audiovisuel (ALIA), dont certains étaient aussi des amis d’Enrico Lunghi. Alain Berwick, ancien CEO de RTL, s’est engouffré dans la brèche pour avancer à nouveau qu’«une certaine énergie a été déployée pour qu’on trouve le moins possible» d’éléments sur l’agression.

«Mis devant le fait accompli»

Omerta, théorie du complot, mise en scène de blessure, reportage orchestré pour nuire à Enrico Lunghi, règlements de comptes entre amis, le procès devient surréaliste. «La justice n’en sortira pas grandie», note Me André Lutgen, l’avocat d’Alain Berwick. «On jette les heures de temps judiciaire à la pelle par la fenêtre pour une affaire qui va faire « pschitt! » à l’arrivée.» Alain Berwick, comme les autres intervenants de RTL, doit être acquitté. «Aucun d’entre eux n’a de raison d’avoir voulu nuire à Enrico Lunghi au-delà de ce qu’il s’était déjà infligé lui-même.»

Marc Thoma n’a quant à lui fait que «retranscrire un fait brut» pour «informer le public», défend Me Baulisch qui rejette les accusations de manipulation des images et du son. Steve Schmit «n’a rien non plus à se reprocher», selon son avocat Thierry Reisch. «S’il était responsable de la diffusion du reportage le 3 octobre, il aurait dû savoir qu’une plainte avait été déposée et il aurait dû pouvoir décider de manière autonome du contenu du reportage et de sa date de diffusion.» Or le prévenu, dont le parquet a requis l’acquittement, dit avoir «été mis devant le fait accompli». «Il a été complètement mis à l’écart du processus de décision.» Bien qu’il prétende le contraire, la décision de diffuser le fameux reportage ne pourrait qu’avoir été prise par Alain Berwick, qui s’en défend. Son avocat précise qu’il «avait autre chose à faire, comme un groupe à diriger».

Le fait est qu’un reportage «à charge contre Enrico Lunghi» – dont «le montage a été manipulé» et jugé «ne pas correspondre aux pratiques déontologiques» par le Conseil de presse et l’Autorité luxembourgeoise indépendante de l’audiovisuel, qui dénonce «une manipulation de l’image et du son pour créer une réalité inexistante» – a été diffusé. Il a entraîné une enquête disciplinaire à l’encontre de l’ancien directeur du Mudam et un audit interne à RTL. L’émission Den Nol op de Kapp a été arrêtée, Alain Berwick a pris une retraite anticipée, Alain Rousseau a quitté la rédaction et Enrico Lunghi, le Mudam.

Le prononcé est fixé au 12 décembre.



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