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Cancer de l’enfant : un congé extraordinaire inadapté


À quelques semaines des élections législatives, la Fondation Kriibskrank Kanner relance le débat autour du «congé pour raisons familiales pour cause grave». Elle souhaite que cette loi soit modifiée, afin de permettre aux deux parents d’un enfant touché par le cancer d’être présents à ses côtés.

Au Luxembourg, 30 à 40 enfants sont diagnostiqués avec un cancer chaque année. S’il existe un congé extraordinaire de 52 semaines (à prendre sur une période de deux ans) pour permettre aux parents d’accompagner leurs enfants durant cette épreuve, il ne peut être pris conjointement par les deux partenaires : une mesure que regrette la Fondation Kriibskrank Kanner, qui soutient depuis 34 ans ces familles touchées par la maladie.

«Lors des premiers entretiens, on voit que les parents sont rassurés de savoir qu’ils disposent de 52 semaines de congé, c’est vrai que c’est déjà une très bonne chose ! Mais les sourires s’effacent rapidement lorsqu’on leur explique que seulement l’un des deux peut en bénéficier, qu’il n’est pas possible de prendre ce congé de manière simultanée», relate Marie Sadler, assistante sociale à la fondation, qui parle d’une «vraie inquiétude» qu’elle rencontre quotidiennement sur le terrain.

Pour la fondation, il est indéniable que la présence des deux parents est primordiale lorsqu’un enfant est touché par un cancer. Le couple forme une équipe face à la maladie et apporte forcément plus de soutien à l’enfant malade et à la fratrie touchée. «La présence familiale autour de l’enfant est très importante, l’impact psychologique est énorme : c’est simple, la cellule familiale devient vraiment partenaire du traitement médical», insiste la directrice de Kriibskrank Kanner, Anne Goeres.

Une course pour la recherche

Ce samedi 23 septembre, la Fondation Kriibskrank Kanner organise la sixième édition de la course solidaire «Lëtz Go Gold». Chaque participant s’engage à collecter un minimum de 200 euros (100 euros pour les mineurs et étudiants de moins de 25 ans) afin de financer la recherche contre les cancers pédiatriques dans le but de découvrir de nouveaux médicaments, améliorer ceux qui existent et en savoir plus sur les causes des cancers pédiatriques. 100 % des dons collectés seront affectés aux projets de recherche sélectionnés par l’initiative «Fight Kids Cancer» grâce aux partenaires qui couvrent les frais de l’événement.

Un partenariat qui prend encore plus d’importance lors d’une rechute ou lors du développement d’un cancer secondaire. Malheureusement, la loi actuelle sur le congé pour raisons familiales n’en tient pas compte : si les parents ont épuisé leurs ressources de 52 semaines dans la période attribuée, ils se retrouvent bloqués.

«Le compteur devrait être remis à zéro, or ce n’est pas le cas! On se retrouve avec des parents obligés de prendre des congés sans solde ou ordinaires pour s’occuper de leurs enfants malades», se désole Marie Sadler. «D’autant que les rechutes sont un signe de résistance aux traitements, donc une situation qui se complique pour le jeune patient et la famille», précise-t-elle.

Un «compteur» remis à zéro, oui, mais… celui-ci n’existe tout simplement pas à l’heure actuelle pour les cas «graves». Les familles ne disposent d’aucun moyen de connaître leur solde restant. «Nous avons déjà eu des cas où des couples ont perdu leur emploi à cause de ça. C’est pourtant une chose toute simple à mettre en place, qui existe déjà pour le congé pour raisons familiales ordinaire. Il suffirait de l’étendre pour que les parents puissent suivre en temps réel le nombre de jours de congé!», martèle l’assistante sociale.

Marie Sadler (à g.), assistante sociale, explique les réalités du terrain, aux côtés de la directrice de la fondation, Anne Goeres.

Des familles confrontées à des décisions vitales

La Fondation Kriibskrank Kanner, confrontée au quotidien à des familles qui vivent des moments difficiles et qui doivent souvent prendre des décisions vitales, pointe également la situation des foyers monoparentaux, très nombreux au Luxembourg. Pour elle, aucun doute qu’il serait opportun d’ouvrir le droit à ce congé extraordinaire à une autre personne de confiance du jeune patient, afin de soulager la famille. «Cela peut être des beaux-parents, si on parle de familles recomposées par exemple, ou des grands-parents, un parrain, une marraine. Il faudrait demander aussi à l’enfant qui il souhaite voir à ses côtés durant cette épreuve et permettre à cette personne de bénéficier de ce congé», explique Marie Sadler.

Des revendications déjà émises l’an passé, lors d’une entrevue avec le ministre du Travail, Georges Engel (LSAP), et le ministre de la Sécurité sociale, Claude Haagen (LSAP), mais qui n’a finalement abouti… à rien. «Ils ont bien compris notre problématique. Il y avait un réel intérêt pour le sujet, de vrais échanges. Mais les jours passent, les congés manquent, les compteurs sont inexistants et c’est une énorme frustration pour nous, parce que la situation n’a absolument pas changé», se décourage Anne Goeres, qui ne compte toutefois pas baisser les bras.

À l’aube des élections législatives, la fondation revient ainsi à la charge et entend remettre le sujet sur la table auprès du futur gouvernement qui sera formé après le 8 octobre. «Il faut qu’ils prennent ce problème à bras-le-corps rapidement. C’est quelque chose que l’on rencontre tous les jours et la situation n’évolue pas. Les besoins sont réels et je suis prête à mettre ma main au feu qu’il n’y a aucun parent qui abuse de ce système. Personne n’a envie d’avoir ce type de congé», conclut Anne Goeres.

«Faire un maximum au Luxembourg»

L’une des problématiques rencontrées depuis de nombreuses années par la Fondation Kriibskrank Kanner concerne l’accès aux soins oncologiques au Luxembourg. À l’heure actuelle, nombreuses sont les familles à devoir se rendre à l’étranger pour soigner leur enfant. Un constat qui avait d’ailleurs provoqué la mise en ligne d’une pétition fin 2022, suivie d’un débat à la Chambre des députés réclamant davantage de moyens dans le pays pour ce type de cas.

«Ça a évolué, ce ne serait pas juste de dire le contraire. Nous disposons désormais d’un service national onco-pédiatrique qui fonctionne au CHL. Ils sont capables de faire toute une série de choses, de traiter des pathologies complètes ici, au Luxembourg. Mais avec une quarantaine de nouveaux cas par an et près d’une soixantaine de types de cancer, il faudrait idéalement six ou sept spécialistes… Ce n’est pas logique à notre échelle», explique la directrice de la fondation, Anne Goeres.

Le raisonnement est donc le suivant : essayer de traiter un maximum de choses au Luxembourg, mais envoyer les patients dans des centres de référence à l’étranger lorsqu’il s’agit de traitements lourds ou encore de greffes. «C’est indispensable pour avoir les meilleures chances de guérison. Ça ne sert à rien que tous les enfants soient traités ici, le pays est trop petit. En revanche, je maintiens qu’il faut renforcer nos moyens, sans pour autant prétendre tout pouvoir faire.»



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