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Cameroun : ce que cache la sortie virulente de Mgr Kleda

Dans sa lettre pastorale publiée début mars, l’archevêque de Douala pense que la corruption est la source des malheurs du Cameroun, et prône la conversion des cœurs et des mentalités pour en sortir.

Souvent taxé d’iconoclaste, l’archevêque de Douala, Mgr Samuel Kleda, vient encore de le prouver le 02 mars dernier. En ce temps de carême, le prélat a rédigé lettre pastorale sur « la conversion des cœurs et des mentalités pour une bonne gouvernance au Cameroun ». Dans, cette missive adressée « aux prêtres ; aux religieux et religieuses ; aux autorités politiques ; aux hommes et femmes de bonne volonté », il compare son pays à « un homme qui descendait de Jérusalem à Jéricho et qui est tombé entre les mains des bandits qui le dépouillèrent et le laissèrent à demi-mort au bord du chemin, après l’avoir roué de coups ». Une référence à l’évangile de Luc 10, 30-37. De manière ferme, l’archevêque de Douala identifie la cause du grand malheur des Camerounais.

« À la source de la majeure partie des maux qui minent le Cameroun aujourd’hui, se trouve la mal-gouvernance avec la banalisation, la légalisation et même l’institutionnalisation de la corruption dans la gestion de lares publica », tranche-t-il. Samuel Kleda poursuit en disant que « la mal-gouvernance et ses corolaires, dans notre pays, proviennent de ce que ce n’est plus l’homme qui est au cœur des préoccupations de nos dirigeants ni l’intérêt général ni le bienêtre de tous. L’accent est plutôt mis sur l’individu, le groupe, le clan, l’ethnie, le lobby, ce qui sacrifie la majorité de la population, la poussant ainsi de manière inexorable vers sa paupérisation et la misère. La mal-gouvernance trouble ainsi la vie politique et freine la croissance sociale, économique et même religieuse de notre pays. Elle détruit les acquis, compromet les aspirations légitimes des citoyens, et met en péril la confiance entre le peuple et les gouvernants ».

Face au tribunal de la conscience, de l’histoire et surtout celui du « créateur », Samuel Kleda se refuse d’être parmi les « complices, partisans directs ou indirects, passifs ou actifs de cette « manœuvre qui a contribué à détruire le Cameroun et à hypothéquer l’avenir des millions de personnes, surtout les jeunes, de cette Afrique en miniature » qu’est le Cameroun. Aussi, de par la « mission prophétique » qui lui incombe, « je voudrais, écrit-il, que chacun prenne ses responsabilités, s’engage, s’implique davantage dans la transformation des mentalités, des comportements et des pratiques pour un Cameroun meilleur ».

Conséquences dévastatrices

Le diagnostic posé par le ministre ecclésiastique, le mal semble être bien plus profond qu’on ne peut l’imaginer, et ceci « dans tous les domaines de la vie sociale jusque dans la vie ordinaire : l’administration, l’éducation, la finance, les marchés publics, l’armée, la police, la gendarmerie, la justice, la religion, la santé publique, etc. » Ce fléau aux conséquences dévastatrices « paralyse aussi le fonctionnement de l’État, crée des injustices et des inégalités au sein de la population et plonge toute la société dans le désespoir face à un lendemain incertain et hypothéqué, voire sombre », constate Mgr Kleda. Par exemple, « dans le domaine politique, les mécanismes mis en place ne favorisent pas la participation de tous dans la gestion de la cité », postule l’homme de Dieu, qui constate par ailleurs que « rien n’est fondé sur un programme politique clair, vrai et soucieux du bien-être de tous.

Cela a pour conséquence le choix de mauvais dirigeants aux postes de responsabilité non pas pour servir, mais pour se servir ». Autre illustration, dans les structures hospitalières « surtout publiques », Mgr pense que « le fait d’avoir été formé moyennant un lourd tribut payé, fait qu’un candidat, une fois devenu médecin, infirmier, personnel de santé, se présente comme ayant une conscience anesthésiée, et le serment d’Hippocrate n’existe plus pour lui. Seul compte l’enrichissement rapide. La santé du malade importe très peu au point que sa prise en charge dépend du rançonnement exigé de lui aussi bien par la structure que par le personnel soignant ». Dans le secteur judiciaire, l’accès à la justice est quasiment réservé aux strates bourgeoises de la société. Autrement dit, qui ne profite qu’aux riches.

Solutions

Néanmoins, tout n’est pas fini. La corruption n’est pas une fatalité. Le Cameroun peut encore se remettre de cette gangrène. L’archevêque de Douala en propose quelques pistes de solutions. Loin d’être un chapelet de préceptes à rebrousse-poil du diagnostic qu’il a préalablement établi, les propositions de Samuel Kleda s’apparentent à des réformes profondes de la société camerounaise. Concrètement, « pour que notre pays retrouve ses lettres de noblesse, il est plus que temps pour chaque Camerounais de redécouvrir les valeurs fondamentales sur lesquelles doit reposer toute société qui se respecte : le respect de la dignité de chaque vie, la vérité, la justice, l’honnêteté, la responsabilité, la liberté, l’amour, l’équité, la loyauté…

Que chacun ait surtout le courage de renoncer au péché qui le rend complice dans la dérive de notre pays », postule l’archevêque de Douala. Outre l’adoption des valeurs, il prescrit la préservation l’institution du mariage et de la famille ; la protection des populations ; la promotion de la justice et de la paix. Il recommande également de vivre la réconciliation ; lutter contre la pauvreté ; prendre soin des pauvres ; tous combattre la corruption ; tous pour la bonne gestion du bien commun ; cesser de voler et restituer les biens volés ; for mer de bons cadres pour la gestion du pays ; réformer le système éducatif au Cameroun ; être des modèles pour les jeunes ; créer des emplois ; accomplir son devoir pour le Seigneur, etc

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