Villerupt serait-elle devenue «la banlieue du Luxembourg ?»

À Villerupt, on n’est pas contre le développement du Grand-Duché du Luxembourg, et celui du nombre de travailleurs frontaliers. Mais on aimerait avoir les moyens de l’accompagner. Sous peine de fractures futures. Immobilier, travaux, éducation, emplois, services municipaux, stationnement et circulation : le point avec le maire Pierrick Spizak.

C’est l’un des sites de Villerupt qui symbolise le mieux l’évolution de la ville en lien avec sa proximité avec le Luxembourg. L’ancien lycée professionnel Henri-Wallon, fermé il y a une dizaine d’années, a été vendu par la municipalité pour 550 000 € à un privé. Parce que la Ville n’a pas les moyens du désamiantage, de la démolition, et de la reconstruction de logements, mais aussi de l’aménagement à l’intérieur des futurs bâtiments d’un périscolaire redimensionné.

Pierrick Spizak veut une rétrocession fiscale

Budget contraint, forte pression immobilière, ou encore nécessité de développement des équipements publics : l’ombre du Luxembourg plane sur ce dossier et sur la troisième commune de Lorraine derrière Thionville et Metz en nombre de frontaliers avec 3 420 personnes.

«Loin de nous l’idée de pointer du doigt celles et ceux qui travaillent au Grand-Duché. Mais tout le monde est bien obligé de reconnaître l’impact de ce phénomène sur nous, les communes frontalières», explique Pierrick Spizak.

Le maire communiste de Villerupt, qui réclame donc comme son prédécesseur la mise en place d’une rétrocession fiscale, entre dans le détail, chiffres à l’appui : «Parce qu’ils n’arrivent plus à se loger au Luxembourg en raison des prix de l’immobilier, des milliers de personnes s’installent ici. On va ainsi passer de 10 000 à 15 000 habitants dans les années à venir. Dans le même temps, on voit que le prix au mètre carré est passé de 2 500 € à 4 000 € ici. Au niveau du locatif, on est à 17,80 € le mètre carré. On est plus chers que la plupart des villes de Lorraine, comme Metz.»

Des besoins accrus

L’arrivée massive d’habitants s’accompagne de besoins accrus. «Le collège, avec plus de huit cents élèves, est presque surpeuplé. On va devoir construire un grand groupe scolaire à Micheville. On recalibre le périscolaire», précise le maire de Villerupt.

«On doit agrandir les vestiaires des clubs sportifs qui accueillent de plus en plus de licenciés. On envisage de faire grossir nos services municipaux comme les espaces verts et la voirie. Mais multiplier par deux le service espaces verts, cela doit se traduire par l’embauche de six agents en plus. Or, c’est compliqué financièrement, et c’est aussi très difficile de recruter pour nous les collectivités, car les gens préfèrent gagner davantage au Luxembourg en faisant le même métier.»

Les constats

Les conséquences de la proximité de ce voisin «boulimique» se ressentent également au niveau du stationnement ou de la circulation : «Les jours de marché ou de pointe, on est entre 10 000 et 15 000 véhicules. On n’arrive plus à suivre. On fait comment pour financer tout ça ? On augmente les impôts ?»

Alors se pose la question qui fâche : «Est-ce qu’on est devenus la banlieue du Luxembourg ? On en est le premier cercle, oui.» Des problèmes de riches ? «Si c’était que ça, ça irait. Mais cette évolution s’accompagne aussi du creusement des inégalités sur notre territoire, avec plus de 22 % de personnes vivant sous le seuil de pauvreté, et qui n’arrivent plus à se loger en raison des prix…»