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Epervier – AtouGate: un grand scandale d’Etat en téléchargement au Cameroun voici les détails

Lazare Atou est allé dénoncer le Directeur Général du Port Autonome de Douala au TCS pour détournement des deniers publics dans un dossier qui, visiblement il ne connaissait pas. Cependant, il a permis de mettre à jour, ce qui pourrait être le plus grand scandale d’Etat depuis l’indépendance du Cameroun. La gestion des actifs résiduels des ex Onpc devenu Pad, Oncpb, Rncf (devenue Camrail).

« Est pris qui croyait prendre ». C’est la situation dans laquelle se trouve aujourd’hui Lazare Atou, le célèbre gestionnaire des actifs résiduels des ex Dncp-Oncpb-Rncf. En allant dénoncer le Directeur Général du Port au Tribunal Criminel Spécial (Tcs), il ne savait pas que celle-ci allait remettre sur la place publique ce qui est considéré aujourd’hui par certains comme le plus gros scandale post indépendance de notre pays.

Pour mieux comprendre cette affaire, il faut aller revisiter l’arsenal juridique autour duquel il s’est construit ce scandale dont le Port Autonome de Douala est l’une des principales victimes et d’où est parti l’affaire.

En effet, Paul Biya avait décidé de faire du Cameroun un hub maritime incontournable dans le golfe de Guinée en engageant des réformes de l’industrie portuaire nationale. La loi n°98/021 du 24 décembre 1998 sera adoptée. La transition induite par les dispositions de cette Loi consacrait la dissolution de plein droit de l’Onpc avec la création de quatre organismes portuaires autonomes.

Le Décret d’application n° 99/127 ‘du 15 juin 1999 créera quatre organismes portuaires autonomes, parmi lesquels le Port Autonome de Douala. Le même jour, le Décret n° 99/128 du 15 juin 1999 portant organisation et fonctionnement des organismes portuaires autonomes sera pris, en même temps que le Décret n° 99/130 qui créait le Port Autonome de Douala.

Cet environnement juridique sera enrichi, le 22 décembre 1999, par la Loi n° 99/016 portant Statut Général des Entreprises du secteur Public et Parapublic qui, en ses articles 78 et suivants, réglemente la liquidation de ce type de société. Celle-ci sera complétée par la loi n° 2017/011 du 12 juillet 2017 portant Statut Général des Entreprises Publiques en ses articles 83 et ‘ suivants.

De l’exploitation combinée de l’article 30 du Décret n° 99/128 du 15 juin 1999 portant organisation et fonctionnement des organismes portuaires autonomes et de l’article 44 du Décret n° 99/130 du 15 juin 1999 portant création du Port Autonome de Douala, il est établi que « les engagements financiers et commerciaux de l’ex-Office National des Ports du Cameroun (Onpc) sont transférés au Port Autonome de Douala ; ceux relevant des autres Ports Autonomes Leurs seront transférés ultérieurement par le Port Autonome de Douala».

Le transfert visé au point précédent intervient par le mécanisme prévu à l’article 79 de’la loi n° 99/016 du 22 décembre 1999 qui prévoit que la dissolution d’une société à capital public intervient à la suite d’un Décret du Président de la République. L’ex-Onpc ayant le statut d’Établissement Public, industriel et commercial devenu « Société à capital public » dans la Loi de 1999 susvisée, il lui est appliqué ces mêmes dispositions, en ce qui concerne sa dissolution.

L’article 85 de la même Loi précise qu’un liquidateur est désigné par le ministre des Finances, concomitamment à cette dissolution. Son article 105, lui, prévoit la clôture de la liquidation dans les mêmes formes.

Quant à la destination possible du patrimoine des entreprises visées plus haut, l’article 96 de la Loi n° 99/016 du 22 décembre 1999 prévoit que, la dissolution est faite au profit, entre autres et à titre gracieux ou onéreux, de l’organisme qui poursuit tout ou partie des dispositions des missions qui incombaient à la structure dissoute ». Ces dispositions consacrent ainsi le droit de reprise dont devrait jouir les Ports Autonomes.

L’imbroglio volontairement entretenu pour piller

Cette affaire, qu’il convient désormais d’appeler Atougate démontre à suffisance comment, malgré l’encadrement juridique, son implémentation a été volontairement détourné par de hauts responsables, qui ont installé pendant de longues années, l’illégalité, confusion et les dérapages qui ont bloqué l’opération de liquidation de l’ex-Onpc avec des conséquences désastreuses.

Tout commence avec la décision N°239/CF/MINEFI/CAB du 17 juin 2002, du Ministre de l’Economie et des Finances d’alors Michel Meva’a M’Eboutou de nommer deux liquidateurs pour un mandat d’une durée de six (06) mois renouvelables, alors qu’aucun acte constatant la dissolution de l’ex-Onpc n’avait été pris, comme prévu par l’article 105 de la Loi n° 99/016 du 22 décembre 1999.

Le mandat sera prorogé deux fois, de janvier 2003 au 30 avril 2003, et de mai 2003 au 31 décembre 2003, pour assurer les opérations de liquidation de l’Ex- Onpc. Ensuite, les liquidateurs poursuivront leurs activités jusqu’en 2006, sans autre prorogation.

Et ce n’est qu’en janvier 2006 que le rapport de clôture de la liquidation sera remis à la Commission Technique de privatisation et des Liquidations (CTPL) pour transmission au Minefi. Soit deux ans après la fin des mandats donnés aux liquidateurs et à la suite de la décision 2006/190/CF/CTPL/P du Minefi du 23 janvier 2006 portant modalités de clôture de certaines liquidations des entreprises du secteur public et parapublic.

Dans le même sens, quatre Arrêtés Conjoints MINEFI/MINUH/MINT seront parallèlement signés le 28 mars 2003. Ceux-ci portent sur la dévolution des éléments du patrimoine de l’Ex-Onpc aux différents organismes portuaires. Le Pad quant à lui est visé par celui de référence n° 03/045/CF/AC/ MINFI/MINT/MINUH.

Ce dispositif exceptionnel sera complété par la Décision n° 00000417/CAB/MINFI du 11 novembre 2013 qui met en place un Comité Ad Hoc, présidé par le Secrétaire Général du ministère des Finances, chaîné du suivi de la gestion et de la sauvegarde des actifs résiduels des” ex-Rncf, ex-Oncpb, etex-Onpc.

Entretemps, le mandat sera donné au Cabinet Atou par une “lettre de mandat” signée du Vice-Président de la CTPL, Ondigui Owono Agnès Solange, le 03 novembre 2006 pour prendre toute mesure de sauvegarde et de gestion des actifs résiduels de l’ex-Onpc de recouvrer les créances.

Cependant, aucun chronogramme de travail ne sera indiqué, ni un budget retenu, encore moins un mécanisme de contrôle comme le relevait à juste titre la Commission d’enquête mise en place en 2008, par le Premier ministre, Ephraim Inoni, sur, instructions du Président de la République.

Pourtant, la dévolution des biens meubles et immeubles appartenant à l’entreprise “dissoute” est clairement établie par l’article 96 de la Loi 99/016 qui consacre en même temps le droit de reprise à titre gracieux ou onéreux de ces biens par la “personne morale investie de tout ou partie de la mission initialement dévolue à l’organisme dissout”.

La Présidence de la République, sur la base d’une requête du Directeur Général du Pad, Etoundi Oyono, par lettre n° B630/SG/PR. du 26 juin 2008 a prescrit au Premier ministre de mettre en place une Commission d’enquête pour faire la lumière sur la cession des actifs Immobiliers de l’ex-Onpc.

La commission sera crééeparArrêté 108/CAB/PM du 1er juillet 2008, avec en son sein des représentants du Contrôle Supérieur de l’État. Ses conclusions seront entre autres un constat d’échec de la liquidation de l’ex-Onpc, au regard notamment de la violation flagrante des textes, dont la Loi n° 99/016, de l’absence d’un système de contrôle et a relevé en même temps “le flou et la confusion dans la mission de sauvegarde des actifs immobiliers résiduels” qui, de plus, s’apparente plus à liquidation. Elle a en outre relevé “l’opacité de la gestion du Cabinet Atou” qui n’a jamais dressé un rapport et a poursuivi ses missions “en dépit de la résiliation de son mandat”.

C’est la CTPL, suivie par le ministre des Finances, qui mettra un terme au mandat susvisé courant 2007. Le 16 janvier 2008, une lettre de la Présidence de la République rapportera cette décision du ministre des Finances. Le 18 mars 2008, la Présidence de la République à travers son Secrétaire Général, Laurent Esso, exigera de redonner au Cabinet Atou le mandat en cours, lui permettant de poursuivre la gestion et la sauvegarde des actifs des liquidations Regifercam, Oncpb, et Onpc dénoncée. Il sera relancé le 26 mars 2008.

Le 08 avril 2008, le ministre des Finances, Essin Menye donnera mandat au Cabinet Challenger Corporation aux fins de:

► recenser les contrats d’occupation des immeubles bâtis et non bâtis des liquidations Onpc, Oncpb, Regifercam ;

► procéder à l’analyse juridique et comptable desdits contrats, identifier et évaluer besoin les actifs résiduels concernés, en assurer la gestion, la sauvegarde et la sécurisation. Ce mandat ne semble pas avoir été dénoncé.

En dépit de tout ce qui précède, un autre mandat, formalisé par une décision n°000970/SG/MINFI du 04 mars 2014, sera signé au profit du Cabinet Atou, par le Secrétaire Général du MINFI, Urbain Noël Ebang Mve, en sa qualité de Président du Comité de Suivi susvisé, “modifiant et complétant les conditions de mandat” de ce cabinet, sans l’avis de son ministre Alamine Ousmane Mey.

C’est dans cet environnement que va se dérouler la mission de contrôle conduite par le contrôle Supérieur de l’État (Consupe) à l’effet de dresser un inventaire de l’actif résiduel de l’ex-Onpc, conjointement avec le Minfi et le Cabinet Atou.

Les conclusions du rapport de la mission susvisée, rendues le 10 février 2017, sont entièrement opposées à celles de la Commission d’enquête, prescrite par Inoni et menée pourtant déjà avec le Consupe.

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