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Drame : il abat un ‘feyman’ camerounais au Koweït

Il avait 47 ans et s’appelait Meli Mustapha. D’origine camerounaise, l’homme aurait perdu la vie dans des circonstances troubles au Koweït. Selon les sources, il serait abattu par balle par un koweïtien qu’il a tenté d’escroquer. L’arabe ayant déjà été victime des arnaqueurs communément appelés « feyman » a cette fois-ci pris ses mesures en tendant un piège au compatriote.

C’est ainsi qu’il amène celui-ci dans le désert lui pour affaire. Sur place, il lui logera deux balles au front et à la poitrine. Plus tard il se rendra à la police pour avouer son meurtre. Selon la source la dépouille du Camerounais se retrouvée plus tard en « décomposition avancée ».

Meli Mustapha ne serait pas à sa première opération avec l’arabe. « Quand le Mougou devient « WISE », le « Wiseman » devient le « Mougou ». Selon les témoignages de l’ami du Wiseman devenu mougou, le Mougou Koweïtien là, c’est un Mougou qu’il a avait déjà travaillé, derrière notre compatriote Meli Mustapha, a cru bon allé encore tchop le mougou pour une deuxième fois, sauf que cette fois là, le Mougou n’était plus mougou, il était wise ce qui a été fatal pour lui !!! » indique le lanceur d’alerte Chance Lion.

La feymania étudiée dans une université française

Le centre d’étude et de recherche internationale de Science Po a mené une étude sur le phénomène d’arnaque au Cameroun appelé feymania. Les travaux dirigés par Dominique Malaquais sont présentés dans un document intitulé « Anatomie d’une arnaque : feymen et feymania au Cameroun »

La rédaction de CamerounWeb vous présente quelque extrait du l’étude réalisé sur le feymania au Cameroun

PORTRAIT D’UN FEYMAN

Il y a, bien sur, feyman et feyman. Le plus connu de tous fut Donatien Koagne, alias le king. 1994, Pretoria. Le journaliste camerounais Pius Njaw e est en Afrique du Sud pour y réaliser une série d’interview s auprès de l’équipe qui prépare l’accession au pouvoir de Nelson Mandela. Il a rendez-vous ce matin-là au ministère des Affaires étrangères. Dans un article publié en 1998 3 , il relate ce qui suit. Il s’attendait à poser les questions, voilà que le ministre en a une, insolite, pour lui : « Y a-t-il au Cameroun un roi au-dessus du président de la République ? » Njaw réplique que non et s’enquiert du pourquoi de la question.

C’est que le cabinet du ministre vient de recevoir un fax de Sandton, quartier huppé de Johannesbourg, où il est fait état de l’arrivée, dans un hôtel cinq étoiles de la place, du roi du Cameroun. La direction de l’établissement souhaite savoir quelles dispositions protocolaires il convient d’adopter. Renseignements pris, Njaw e établit que non seulement il ne s’agit pas d’un roi ni même d’un chef – il caressera un instant l’idée que celui dont on parle est Joseph Ngnié Kamga, leader d’une puissante chefferie de l’Ouest-Cameroun –, mais d’un citoyen camerounais ordinaire, un certain Colbert Nya. Non sans difficulté, Njaw e parvient à obtenir un rendez-vous avec le mystérieux M. Nya. En août 2000, il racontait, encore amusé, sa rencontre avec celui que l’on disait roi. A l’hôtel, on le dirige sur la suite présidentielle. A la porte se tient une jeune femme couverte d’or.
Le journaliste avance de quelques pas ; ses chaussures disparaissent dans quinze centimètres de moquette. Devant lui, un petit salon Louis quelque chose, point d’entrée dans un immense appartement. Des jeunes gens s’y affairent. L’un d’entre eux se débat avec une télécommande censée contrôler à distance les rideaux de l’enfilade de pièces. Réussite : un rideau se lève, révélant une mezzanine où se tient un homme tout d’or vêtu – robe de chambre dorée, babouches couleur or et bijoux éclatants. Ni Ngnié ni Nya, il s’agit en fait de Donatien Koagne. Njaw e ne l’avait jamais rencontré, mais le connaissait de nom. Au pays, on parlait beaucoup de lui. On le savait richissime ; on disait illégale, voire maffieuse, l’origine de sa fortune, mais on n’en savait guère plus. Enchanté d’avoir surpris Njaw e, que le spectacle avait en effet pris de court, Nya/Koagne se dit ravi de faire la connaissance du patron du Messager, journal phare de l’opposition au président Paul Biya (la remarque est à double tranchant, étant donné les liens que Koagne entretenait, nous le verrons, avec la classe politique camerounaise).

Quarante-cinq minutes durant, Njaw e tenta de lui tirer les vers du nez : que faisait-il en Afrique du Sud ? Quel business y traitait-il ? De façon plus générale, quelles affaires brassait-il ? Il n’apprit rien de précis. Koagne disait avoir récemment racheté la CAPME (structure d’aide aux PME, aujourd’hui disparue). C’était là, disait-il, son domaine d’activité ; il était à Johannesbourg pour acheter un avion, un bateau. Njaw e quitta la suite du « roi » guère plus informé qu’à son arrivée, mais convaincu qu’il y avait anguille sous roche. Par la suite, le journaliste apprit que Koagne avait tissé des liens étroits avec l’ANC: « Il avait complètement investi le parti de Mandela ; toute une section de l’entourage présidentiel avait été corrompue ». Mandela lui-même avait certainement été berné, quoique l’on ne sache pas exactement comment : à Njaw e, comme à d’autres par la suite semble-t-il, Koagne montra des photos sur lesquelles il apparaissait aux côtés de l’illustre chef d’Etat, ce qui suggérait, sinon l’existence d’une amitié, du moins celle d’une relation lui permettant d’avoir accès au grand homme. Pire, Donatien aurait été présent à l’inauguration de Mandela en tant qu’invité officiel 4 . Il s’avéra que Mandela n’était pas le seul chef d’Etat africain avec lequel Koagne avait établi des liens. Dans un album-photo qu’il aimait à feuilleter en public, on pouvait le voir aux côtés de nombreuses personnalités, dont le maréchal Mobutu et le président du Congo-Brazzaville, Denis Sassou-Nguesso.

Si Koagne ne se brouilla pas avec Mandela, ses relations avec Mobutu, Sassou et d’autres furent houleuses. C’est qu’il leur joua un bien mauvais tourº On sait aujourd’hui que Donatien, depuis la fin des années 1980 au moins, trempait dans toutes sortes d’activités illégales : faux-monnayage (entreprise dont il partageait les risques et bénéfices avec un frère au nom prédestiné, Gutenberg), trafic de drogue et, plus lucratif encore, d’uranium, contrôle de cercles de jeu illégaux à Doualaº Il brillait en particulier dans un domaine dont il avait fait sa spécialité : celui de l’escroquerie financière. Le journaliste Jean-Moïse Braitberg décrit ainsi l’arnaque Koagne, aujourd’hui légendaire au Cameroun : « La spécialité [de Koagne et de son] clan [Donatien, Gutenberg et une jeune sœur nommée Jeanne-Magloire] consiste à faire croire à de riches pigeons qu’il dispose d’un moyen ultrasecret pour transformer le papier blanc en [dollars] [º] La proie [est] convi[ée] à une séance privée destinée à la convaincre de l’efficacité du procédé.

Avant [son] arrivée, les Koagne prennent soin de glisser un vrai dollar entre deux feuilles de papier blanc et de répéter l’opération jusqu’à constituer un épais bloc de papier prétendu « vierge », prédécoupé au bon format. Quand la victime se pointe, ces sandwichs d’un nouveau genre sont solennellement enduits d’un « liquide miracle » (en réalité un acide utilisé en photographie), puis plongés dans un bain de teinture d’iode. [Celle-ci], mise en présence de l’acide, a la propriété de dissoudre le papier [ º] des Koagne, mais pas celui, ultrarésistant, employé dans la fabrication des dollars. Après quelques minutes [ º] l’un des Koagne saisit ses pinces et ressort du « bain magique » des poignées de dollars. Si la victime [º] se précipite à sa banque pour vérifier l’authenticité des billets « créés » sous ses yeux, l’établissement lui confirmera qu’il s’agit bien là de véritables dollars [º].

La proie est à point. Elle est prête à acheter, fort cher (en moyenne 5 millions de francs), le « procédé magique » » . Plus d’un s’y est laissé prendre : Mobutu, à qui Koagne est censé avoir soutiré ainsi 15 millions de dollars ; Blaise Compaoré, président du Burkina Faso, qui en aurait perdu 40 ; Etienne Eyadéma, leader du Togo, son homologue congolais Sassou-Nguesso, plusieurs ministres, dont un Gabonais, un Tanzanien, un Espagnol, plusieurs Kenyans et un ci-devant membre des services secrets israéliens. D’autres encore se feront prendre, parmi lesquels plusieurs personnalités à Djibouti et un haut fonctionnaire yéménite .

Mais le Yémen, lieu de son dernier « coup fumant » (expression qu’affectionne Le Messager), ne porta pas chance à Donatien. Les déboires yéménites de Koagne valent la peine qu’on s’y arrête, parce qu’ils mettent en relief un aspect important de la feymania : la panique qu’elle sema dans certains milieux politiques et diplomatiques ainsi que dans les services secrets de plusieurs pays, africains comme occidentaux. Fin 1994, Koagne arrive à Sanaa, où il embobine un membre de la police secrète yéménite. Quelques mois plus tard, il fait une brève escale à Paris. Son mode de transport : un Falcon 50 qu’il a loué à la suite d’une malencontreuse collision entre son Falcon à lui (coût : 12 millions de FF) et une gazelle égarée sur la piste d’atterrissage de l’aéroport de Nairobi. Alors que l’avion de location s’apprête à décoller du Bourget, un douanier demande à examiner les bagages de Koagne.

Il y découvre quelque deux mille millions de dollars en coupures. Il en réfère à ses supérieurs, qui confisquent le magot et écrouent le Camerounais. Celui-ci sera libéré cinq heures plus tard, à la suite d’un appel quelque peu mystérieux. L’argent, lui, reste avec les douaniers ; il s’agit d’établir si les dollars sont vrais ou faux. Authentiques, répondent les Américains, après inspection des coupures. Mais l’affaire ne fait que commencer : « Les Américains [n’ont] pas tout dit [aux Français]. Certes, les billets sont bons, mais les recherches menées à Washington sur les numéros de série révèlent qu’ils font partie d’un don consenti par les Etats-Unis au Trésor yéménite au titre de l’aide bilatérale »7 . Avant que le fisc ou la douane américaine ait pu faire quoi que ce soit, le Yémen passe à l’action. Apparemment convaincu que sa supercherie n’a pas encore été découverte, Koagne a mis à nouveau le cap sur Sanaa.

La police yéménite l’y attend de pied ferme. Le feyman est arrêté et mis au secret. Les choses en seraient peut-être restées là, n’était un détail : un carnet dans lequel Donatien avait noté l’identité de ceux qu’il avait escroqués et les sommes qu’il leur avait soutirées. Ce carnet, tout le monde le veut : les « grands » piégés par Koagne, qui ne souhaitent pas voir leur nom traîné dans la boue par des ennemis politiques auxquels il aurait fourni des munitions ; le gouvernement français, qui tient à protéger ses « amis » africains ; les Américains, que les dollars de Donatien intéressent passablement et que les Français soupçonnent d’être à l’affût d’informations dommageables aux intérêts de la métropole en Afrique. Le Quai d’Orsay met la main à la pâte. Il faudra plusieurs mois à un de ses hauts fonctionnaires, une certaine Catherine Boher, pour établir exactement où Koagne se trouve. En juin 1996, cette dame s’envole pour Sanaa, où elle apprend qu’elle pourra récupérer Donatien et le fameux carnet si l’escroc rend l’argent qu’il a volé, soit quelque trois millions de dollars. De retour à Paris, Boher s’entretient de l’affaire avec un collègue, Jean-Michel Beaudoin.

Celui-ci échafaude un plan : camouflée à bord d’un yacht de plaisance, une équipe de « spécialistes » sera subrepticement débarquée au Yémen pour récupérer le cahier, le magot et, accessoirement, Donatien (l’opération ne se fera pas). Il est question aussi d’une rançon qu’un groupe de chefs d’Etat africains serait prêt à verser pour obtenir la libération de Koagne, dont « la présence est indispensable pour retirer des fonds déposés dans des établissements bancaires monégasques appartenant auxdits chefs d’Etat » .

Boher, elle, continue à négocier avec les autorités yéménites. Puis elle se tourne vers la famille de Donatien. S’ouvre alors un troisième chapitre. Là aussi, selon certains, il s’agit de feymania, mais d’un genre quelque peu différent : le clan Koagne deviendrait le dindon de la farce. Karl Laske, journaliste à Libération, rapporte ainsi les faits : « [Boher, qui] affirme qu’un de ses amis compte parmi les victimes de Koagne, négocie avec [la sœur de celui-ci] le remboursement aux Yéménites, et réceptionne certains payements. » Rien n’en résulte. « La famille de Koagne soupçonne [Boher] de détournement [et] dépose plainte à Paris » . Qu’est-il advenu de Donatien ? On n’en sait trop rien. Il n’a pas été libéré, mais serait toujours en vie, ce qui laisserait supposer que l’argent de son forfait n’a toujours pas été récupéré. A Douala et Yaoundé, la rumeur court qu’il aurait été amputé des deux mains par ses capteurs yéménites. Quant au carnet, certains pensent que les Français l’ont, d’autres, dans la mouvance du président Biya, que le gouvernement camerounais le détient.

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