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Ascension sociale : Voici enfin le jour où tout à changé dans la vie d’Amougou Belinga

Le vendredi 06 mars 2006, Jean-Pierre Amougou Belinga fut condamné à 4 mois de prison et au paiement d’un million francs CFA d’amende par le tribunal de première instance de Yaoundé Centre . Le directeur de publication venait de perdre la bataille juridique face au ministre Grégoire Owona. Mais Amougou Belinga vient de remporter une autre victoire. Son nom vient d’entrer dans le registre des célèbres journalistes à polémique du Cameroun. Jeune Afrique, le Monde… tous les médias internationaux ne parlent que du Directeur de publication qui a dressé la liste des 50 ministres homosexuels du Cameroun.

« En 2006, l’hebdomadaire L’Anecdote avait publié un « Top 50 des homosexuels présumés du Cameroun » : ministres, directeurs généraux, patrons du privé et journalistes furent cités. Certains, s’estimant calomniés, avaient porté plainte. On s’attendait à une cascade de condamnations. Ce fut une tempête dans un verre d’eau. La justice se montra d’une étonnante mansuétude à l’égard ce justiciable peu commun », se rappelle Jeune Afrique.

Depuis la publication de cette liste, Amougou Belinga a fait son entrée dans le sérail. La vie de l’homme a changé. Il gagne de nombreux marchés à la présidence de la République. Le jeune patron de presse tisse des relations particulières avec de nombreux ministres et proches de la famille présidentielle.

infoscameroon vous propose l’intégralité de l’article de Bonaberi sur les ministres homosexuels

Paru le 24 Janvier, à la suite du Journal « La Météo » qui était le premier à publier cette liste surprenante quelques jours auparavant, L’Anecdode nous présentera un dossier relativement plus intéressant ressemblant réellement au résultat d’une longue enquête.

La structure et le contenu global du journal saura nous conforter qu’il n’a pas été publié, uniquement, pour rebondir sur le terrain de la polémique. Le titre est sobre « La liste complète des homosexuels du Cameroun » et quatre pages sont dédiées au sujet dont trois exclusivement aux personnalités incriminées avec une petite présentation des éléments à charge contre eux.

Les trois premières pages du dossier, qui présentent les résultats de l’enquête sur les personnalités, rédigées par la plume même d’Amougou Bélinga, directeur de la publication du journal, sont particulièrement rassurantes. Le chapo qui introduit le dossier marque d’ailleurs un bon point pour le journal et est tout aussi poignant que celui de La Nouvelle Afrique, car posant relativement bien le problème :

« Des hommes se faisant l’amour par des orifices les plus dégoûtants, ou les femmes s’entre-léchant tendrement. Il s’agit bien d’actes crapuleux pour la décence sociale.[…]De la base au sommet de l’Etat, dans la culture comme dans le sport, dans l’administration comme dans les affaires, même au sein du clergé, l’homosexualité trace sa voie au Cameroun, avec parfois comme acteurs ceux-là dont la fonction commande plutôt de la combattre. Faut-il s’en complaire en restant silencieux face à la valse d’invasions incestueuses qui polluent la société ? […]L’Anecdote refuse de se rendre complice de la déliquescence civique et morale de la jeunesse. »

Cela dit, lorsqu’on rentre effectivement dans le coeur du dossier et le décortiquage tête par tête des homosexuels présumés, on est surpris par le manque d’éléments probants. Revenons sur quelques cas.

** Philippe Mbarga Mboa, Ministre des Sports
L’Anecdote parle de « murmures » à Yaoundé : « ses ébats amoureux avec sa dame Aristide Okouda étaient murmurés dans la capitale ».

** Marie Claire Nnana, DG de la Sopécam
Le journal parle là « d’indiscrétions » : « Nos indiscrétions la disent d’une gloutonnerie sexuelle mais plutôt avec des partenaires de même **** ».

** Marafa Hamidou Yaya, Ministre d’Etat en charge de l’AT
Le journal utilise les termes « les coulisses du pouvoir » et « murmures » : « Dans les coulisses du pouvoir, il se murmure que c’est à travers lui que la présidence de la république a été infectée par l’ignoble activité. »

** Père Jean Hervé, principal du collège Mvogt de Yaoundé :
L’Anecdote réutilise le terme « indiscrétions » : « Selon certaines indiscrétions recueillies au sein de son établissement, la sodomie des jeunes ferait partie de son sport favori ».

** Yannick Noah, préparateur psychologique des lions
Le journal utilise le conditionnel et parle d’une revue qu’il ne cite pas : « Yannick Noah aurait avoué son homosexualité dans les colonnes d’une revue française. »

Tout le reste du « décortiquage » des éléments qui ont permis de lister les présumés homosexuels sont de cette teneur : ils sont flous. A croire que les journalistes se sont contentés de faire une compilation de toutes les rumeurs et les ragots qu’on pouvait entendre dans les artères de Yaoundé. L’utilisation des mots « indiscrétion », « murmures » et l’usage massif du conditionnel démontre dans ce dossier de la grande nécessité de réserve qu’il faut accorder aux informations distillées.

Pour clôturer leur dossier, L’Anecdote reviendra en dernière page reviendra sur la pratique de l’homosexualité dans la franc-maçonnerie, dans l’ église et sur l’appel à lutter contre ce « fléau », lancé le 25 Décembre dernier par l’archevêque Victor Tonye Bakot. Rien de plus qui pourrait conforter le sentiment d’homosexualité de tel un ou tel autre.

Finalement, s’il faut dire que l’entrée en matière de L’Anecdote avait de quoi ravir plus d’un, à la lecture complète du dossier, on reste malheureusement sur notre fin tant les éléments de démonstration auront été d’une légereté journalistiquement inacceptable. Et là encore, de s’interroger sur les motivations qui furent celles de rédaction de ce journal lors qu’a été prise la décision de publier cette pseudo-enquête ?

Homophilie ou homophobie

Néanmoins, au vu des réactions que cette affaire a provoqué sur le triangle national, il est important de préciser que si l’on sort du cadre du libéralisme ****** occidental qui voudrait que chacun puisse librement disposer de ses moyens de reproduction comme il l’entend, le fait de diffuser une liste de personnes homosexuelles, de surcroît des personnalités publiques, ne devrait avoir rien de choquant. En effet, en plus du fait que cette pratique se place en porte-à-faux des traditions séculaires africaines, il est utile de préciser qu’elle est aussi punie par la législation. Toute personne dont on aurait réussi à établir des orientations sexuelles homosexuelles tombent donc sous le coup de la loi : la loi de Dieu pour ceux qui y croient, mais surtout la loi pénale Camerounaise sous couvert de l’article 347 bis ordonnance de 1972 qui condamne fermement la pédérastie.

Le vrai problème ne réside donc pas dans la publication de ces noms, d’un point de vue strictement journalistique, mais plutôt dans l’acharnement par trois journaux (aux sources clairement disparates), à publier des noms sans faisceau de preuves et sans enquête digne de ce nom, avec ce que cela peut provoquer comme atteintes à la vie privée, dans une société africaine où le regard de l’autre change parfois radicalement sur la base de simples rumeurs.

Que ce soit dans La Nouvelle Afrique ou dans L’Anecdote, aucun témoignage, aucun nom de personne vivante, aucune photo, aucun extrait de courrier, de conversation téléphonique ou autre chose tendant à corroborer les affirmations n’a été présenté aux lecteurs. Rien. Que des sommes d’anecdotes aux origines douteuses et qui ne sont, dans l’état actuel des choses, pas forcément vérifiables. De plus, connaissant l’imagination dont font preuve les camerounais pour transformer en vérité intangible de simples élucubrations au coin d’une gargotte, il y’a lieu de s’inquiéter sur la forte probabilité du caractère diffamant d’une partie de cette liste d’homosexuels présumés.

Le cas de La Nouvelle Afrique restera certainement le plus édifiant tant son dossier, relativement hors-sujet sur le thème de la liste même, aura fait montre d’un manque de rigueur journalistique et de profondeur sur la vraie question de l’homosexualité dans notre pays.

Dans tous les cas, nos deux hebdomadaires devront comprendre qu’une affirmation, même vraie mais énoncée sur la base d’une démonstration boiteuse ou fausse n’a pas plus de poids qu’une affirmation erronée.

Néanmoins, à défaut d’avoir montré au grand jour les quelques lacunes d’une presse écrite, qui on l’espère saura retrouver ses lettres de noblesses, les journalistes de nos deux hebdomadaires auront au moins, accordons le-leur, eu le mérite de poser enfin, vigoureusement, le débat sur l’homosexualité au Cameroun et sa pratique dans les cercles du pouvoir à des fins machiavéliques.

En conclusion, la question qu’il est légitime de se poser est de savoir s’il faudra, s’obstiner à interdire la pédérastie et pérpétuer ainsi notre tradition homophobe en se cachant derrière le masque de valeurs morales elles-mêmes profondément meurtries par les offensives culturelles extérieures. Ou encore, finalement, se plier aux normes de notre gourou de toujours, l’occident, et devenir ainsi un des chantres de l’homophilie en Afrique ?

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